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Atlas du vignoble de Bordeaux

La naissance des terroirs 

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Le maintien des privilèges

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Instaurés au Moyen-Âge, ils perdurèrent jusqu’à la Révolution française. Ainsi en fût-il de la région dite de « Nouvelle conquête.

Entre Bordelais et  Haut-Pays fut en effet institué un pays dit de la nouvelle conquête, comprenant les vignobles actuels de l’est de l’Entre-deux-Mers, du pays foyen et des Côtes de Castillon en Gironde, mais aussi les vignobles de Duras et de Montravel, avec des avantages fiscaux et la possibilité de faire descendre leurs vins vers le port de Bordeaux à partir de la Saint-Martin, soit le 11 novembre. Ils gagnaient ainsi près d’un mois et demi sur leurs rivaux plus taxés du haut pays.

Carte dite du pays de Nouvelle-Conquête représenté par le triangle dont le sommet serait Sainte-Foy et la base, la ligne de Saint-Macaire à Castillon

L'émergence de la qualité

Le vin était alors pour le port de Bordeaux un produit quasi exclusif assorti de privilèges importants qui favorisèrent un fort développement du vignoble dans toute la juridiction. Par rapport à la fin de la période médiévale, l’infrastructure géoéconomique de la période moderne avait été profondément bouleversée à la fois par l’élargissement du marché des vins, de l’Angleterre à l’ensemble de l’Atlantique nord, et l’arrivée de  nouveaux concurrents et de nouveaux clients. Il s’en suivit une fragmentation initiale due à la diversification de la demande.

Les marchands hollandais étaient acquéreurs de types de vins nouveaux, des vins blancs surtout moelleux très prisés dans les pays du Nord de l’Europe[1], des vins noirs dits vins de cargaison[2] pour l’exportation vers les colonies et les autres marchés lointains, de vins blancs de chaudières pour la production d’eau de vie[3]. Cette demande eut pour effet une diversification des productions de l’ensemble des bassins de la Garonne et de l’Adour.

Pour satisfaire leur clientèle, les marchands hollandais incitèrent les producteurs de claret à réorienter leur production et surtout favorisèrent les investissements. Le 16ème siècle est une grande période d’essor de la vigne dans l’actuel Sauternais. La genèse des grands crus du Sauternais fut très similaire à celle des crus médocains.

 

[1] Le rôle des marchands huguenots originaires du Bergeracois fut sans doute essentiel dans la mise en place de ce courant commercial.

[2] Il s’agissait de vins issus de cépages noirs et plus alcoolisés, qui ainsi supportaient mieux les aléas du transport. En Bordelais, ils provenaient des palus

[3] L’essor de la marine et du commerce colonial accrut une demande en eau-de-vie, à la fois comme boisson hygiénique et inaltérable pour les marins mais aussi pour le troc dans les comptoirs et autres territoires colonisés.

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Cette carte montre une géographie viticole du Bordelais devenue de plus en plus complexe. Les vignes productrices de vins noirs envahirent les terres basses qui bordent la Garonne et la Dordogne, les palus. De part et d’autres de la Garonne, au droit de son confluent avec le Ciron les vignerons se spécialisèrent dans la production de vins moelleux. La région des Graves proches de Bordeaux, mais aussi les quelques croupes de graves médocaines, et les coteaux dominant la rive droite de la Garonne conservèrent une production traditionnelle de claret. Dans le Saint-Emilionnais, la culture de la vigne, récemment développée là aussi sous l’influence des Hollandais, demeurait une culture secondaire « à cause de la rigidité des structures agraires en métairies et en bourdieux »[1]. Dans l’intérieur, c’est-à-dire à l’écart des deux mers et notamment au centre de l’Entre-deux-Mers et en Blayais intérieur, une récente production de vins blancs satisfaisait la consommation locale et les surplus alimentaient les chaudières.

 

[1] idem, p.239

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Cette géographie contrastée fut confirmée par la fameuse taxation de 1647, premier classement des vins du Bordelais connu.[1]. Etabli à la demande de la Jurade de Bordeaux, afin de fixer les minima et maxima pour la production de l’année, cette mercuriale ne constitue en aucun cas un classement qualitatif. Il s’agit en fait d’une liste parmi d’autres, heureusement conservée dans les archives.

 

[1] Henri Enjalbert, idem, p.240-241 et Jr. Dewey Markham, Histoire d’un classement des vins de Bordeaux, Bordeaux, Féret, 1997, p.58-59

La multiplication des grands domaines

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L’essor des Provinces-Unies se traduisit en effet par ce qu’Henri Enjalbert appela « la révolution des boissons » (Henri Enjalbert., Histoire de la vigne et du vin, l’avènement de la qualité, Paris, Bordas, 1975, 207 p.). La pression du marché et des innovations techniques permises par des investissements de plus en plus élevés, principalement au cours du 18ème siècle (essor d’une nouvelle viticulture) allaient façonner des régions entières, notamment celles dominées par les vignobles de l’aristocratie et la diffusion d’innovations à la base des New French Clarets.

La principale région concernée en Bordelais fut celle du Médoc (René Pijassou, Un grand vignoble de qualité, le Médoc, Paris, Taillandier, 1980, chap.7, p. 421-517). Le 18ème siècle y est la grande période de colonisation. Vers 1710 la presqu’île était encore faiblement viticole mais dès 1775 les principaux terroirs avaient été colonisés par la vigne. C’est le siècle de la genèse des grands crus grâce aux investissements de l’aristocratie parlementaire bordelaise. La fragmentation fut ainsi amplifiée par des phénomènes de distinction. La création de domaines fonciers bien regroupés, (le château viticole avant la lettre) et parallèlement la transformation profonde des techniques de vinification, avec l’affirmation des new french claret. Un grand terroir était alors en construction.

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